Conseil municipal du 29/02/2024 – Résumé des débats sur le projet de terrain synthétique


UN PROJET FANTÔME ?

Ce que disent les notices des délibérations et le rapporteur en séance :

  • « Cette demande de subvention […] concerne le projet de remplacement du terrain en herbe Chabrat avec la création d’un terrain de grands jeux synthétique avec éclairage LED. »
  • Une « réflexion » a déjà été menée en amont, « en concertation avec les associations sportives locales et les établissements scolaires fréquentant régulièrement l’installation (élémentaire, collège de la Guyonnerie et l’Université Paris Saclay) »
  • Projet suffisamment avancé pour que soit précisé qu’il « répond également à certaines exigences particulières de protection des pratiquants et aux critères suivants (teneur en hydrocarbures aromatiques polycycliques HAP, provenance et traçabilité des produits de remplissage, respect des normes de toxicité et environnementales) ». [Pas exposé en séance par le rapporteur, voir délibérations 2,3 et 4]

Ce qu’on peut lire dans la version initiale des projets de délibération :

  • [Le conseil municipal] « Autorisele Maire à déposer un dossier de demande de subvention auprès de … »
  • Donne son accord pour la réalisation des travaux concernant le projet de création d’un terrain de grands jeux synthétique pour un montant prévisionnel de 800 000€ HT soit 1 000 000 TTC.
  • […] « Dit que les crédits nécessaires ont été inscrits au budget primitif 2024 de la Commune. »

Ce que fait remarquer Dominique JACQUET (élue Ensemble pour Bures) :

« Je trouve ça très surprenant de solliciter l’avis du conseil sur un équipement dont on n’a pas la description, mais ce qui n’empêche pas de demander au conseil d’autoriser les travaux. ».

Rétropédalage du Maire (#bienessayé) :

« Bon, effectivement, il s’agit d’une demande de subvention. […] il ne s’agit en rien d’une demande d’accord pour la réalisation des travaux, et je propose qu’on retire cette phrase. »

MOTIVATIONS D’UN TEL PROJET ?

Objectifs affichés dans les notices des délibérations :

« Permettre le développement du football féminin, du touch rugby, du sport scolaire, du sport en accès libre, du sport sur les temps péri et extra-scolaire et du sport inclusif afin de toucher toutes les populations ».

Raisons invoquées par le rapporteur :

« Répondre à une demande de la part des pratiquants », terrain en herbe inutilisé de mi-novembre à mi-mars, fragilité du gazon en herbe, coûts d’entretien, frais de fonctionnement et « raisons de propreté ».

Raisons invoquées par le Maire :

  • Une demande ancienne du club de foot Bures-Orsay, « l’attente du club » ; « maintenir le terrain [en herbe] pour une utilisation en compétition, homologation compétition, d’octobre à avril » ;
  • Le terrain en herbe, « ça coûte une blinde », en moyens humains, en entretien » ;
  • Des terrains synthétiques, « il y en a partout autour de nous » (pas à Bures contrairement à ce qu’affirmait le Maire avant de rectifier) ;
  • « Il y a énormément de Buressois qui sont dans le club de Bures-Orsay. ».

Questions en suspens :

  • A combien s’élèvent les frais d’entretien du stade en herbe en temps habituel ?
  • A combien s’élèveraient les frais d’entretien pour une homologation « compétition » ?
  • Combien de Buressois-es inscrit-e-s dans le club de foot Bures-Orsay ?
  • Pour quel usage synthétiser le stade à vrai dire ? Compétition, loisir, scolaire ?

PEUT-ON IGNORER LES ALERTES ?

Dominique JACQUET a rendu compte de la documentation recueillie par les élu-e-s d’Ensemble pour Bures en amont du conseil et tenue à disposition des membres du conseil qui le souhaitent :

  • Depuis octobre 2023, « les microparticules de polymères synthétiques dans les équipements sportifs » sont interdites par la Commission européenne (dérogation pour les installations déjà en place, donc pas applicable à Bures) ;
  • Des études scientifiques pointent la présence de « polluants éternels » dans 4 échantillons sur 10 de gazons synthétiques analysés (université de Stockholm), l’ampleur de la pollution marine par les fibres de gazon synthétique (université de Barcelone) ;
  • Plusieurs états américains ont pris des moratoires et le président de l’association des joueurs de foot US professionnels s’est exprimé publiquement en faveur du gazon naturel.
  • « Je préfèrerais très nettement avoir une demande de subvention pour améliorer un terrain enherbé qui par ailleurs rend des services écologiques qui ne sont absolument pas rendus par un terrain synthétique. »

LE POINT DE VUE DE LA MAJORITE

Vigilance, relativisme, foi en des solutions techniques à venir

Le Maire a donné la parole à Pascal VERSEUX, conseiller municipal délégué au Parc Naturel de la Haute Vallée de Chevreuse (et non à l’adjointe chargée de la transition écologique) :

  • « Je suis d’un côté parmi ceux ici qui sont très engagés dans la transition et en même temps je soutiens ce projet en tant que membre de la majorité » ; « chacun de ces aspects est à traiter, mérite une réponse un peu adaptée et nuancée. » ;
  • « Il y a des choses comme ça qui dépendent beaucoup de la technologie, donc ça va être à nous de bien être vigilants là-dessus » (pollution plastique, perméabilité …) ;
  • Matériaux, ce qui est exclu : les microbilles de plastique ou de caoutchouc (pneus recyclés), les noyaux d’olives concassés (trop abrasifs), les fibres de coco (pourrissement). « Ce qui semble tenir la route aujourd’hui, c’est une couche de sable et une couche de liège » ;
  • Recyclabilité : aujourd’hui pas de filière existante, des usines à l’étranger, mais « pour moi ce n’est pas tellement ce qui m’inquiète parce qu’il y a des progrès de jour en jour et d’ici 15-20 ans … » ;
  • Biodiversité : « il faut relativiser, […] on sait qu’une pelouse en herbe est très pauvre en biodiversité » ;
  • Îlot de chaleur : « cet aspect […] est relatif, il existe mais ce n’est pas […] ce qui m’interpelle le plus. »

AUTRES OBSERVATIONS DE ELU-E-S D’ENSEMBLE POUR BURES

Adrienne RESSAYRE :

  • Concernant l’argument de propreté : les pelouses synthétiques sont des bouillons de culture, il faut les désinfecter régulièrement. Quid des infections en cas de blessures ?
  • Exemplarité : si la municipalité adopte le synthétique pour un équipement public, comment sensibiliser les habitant-e-s à son impact en termes de biodiversité ?
  • Quid de l’irréversibilité d’une telle installation ?

Thierry PRADERE :

  • Rappelle qu’en 2018, la FFF affirmait l’innocuité des billes de remplissage à base de pneus recyclés et que 5 ans plus tard la Commission européenne les a interdits. Le nombre de cancers en lien recensés aux Etats-Unis est alarmant.
  • Accrochage des brins d’herbe artificielle : certes, il y a des techniques différentes, mais des débris rejetés dans la nature « il y en aura un peu moins, y en aura un peu plus, mais il y en aura » ;
  • Pourquoi ne pas réhabiliter le terrain stabilisé à proximité immédiate du groupe scolaire et du collège ?
  • Dénonce une « hérésie » dans le fait que les subventions portent uniquement sur l’investissement, ne prennent jamais en compte la dimension « fonctionnement » (entretien, maintenance des équipements), ce qui « pousse à faire de l’investissement puis à changer l’investissement » ;
  • Discuter avec les usagers pour les amener à recalibrer leurs demandes en fonction de l’impératif de sobriété ?

A PARTIR DE LA, COMMENT AVANCER?

Après avoir remercier les intervenant-e-s pour la qualité du débat, le Maire :

  • Identifie l’enjeu selon lui : « la rencontre de l’urgence climatique et de la transition écologique avec la vie quotidienne d’une ville et ses clubs sportifs, de leurs demandes, de leurs attentes, et des décisions que nous on doit être amené à prendre. »
  • Affirme que « personne ici, dans cette équipe municipale, n’a envie d’installer un équipement qui pourrait porter atteinte à la santé de nos concitoyens. Personne ici n’a envie d’installer un équipement qui pourrait faciliter l’inondation d’un quartier. Personne. »
  • Propose dans l’immédiat de « délibérer pour lancer la demande de subvention » pour « être dans le tuyau si jamais on y va ».
  • Propose de charger le comité biodiversité, élargi aux élus et services concernés, d’instruire le dossier (par des auditions), de produire un rapport sur lequel s’appuiera le conseil municipal de juin pour « prendre une délibération pour savoir si on y va ou non. […] chacun prendra ses responsabilités, majorité et opposition au regard du travail qui aura été fait. »

Thierry PARDERE, qui avait dit plus haut son opposition « à un projet destructeur, antiécologique et qui hypothèque l’avenir de nos enfants », demandé sans succès « un vote à bulletin secret un vote à bulletin secret pour que chacun puisse s’exprimer en conscience et en confiance, considérant que cet acte, de demander des subventions, vaut quelque part, même si on corrige, accord au projet » , explique pourquoi les élu-e-s d’Ensemble pour Bures voteront « contre » la demande de subvention:

« J’ai entendu votre ouverture. Néanmoins, la confiance est quelque chose qui se construit, donc moi j’ai aucun problème pour qu’on avance avec vous dans la documentation, dans la construction de ce projet, mais en attendant, par rapport à cette délibération qui je le rappelle, n’est compatible qu’avec un terrain synthétique, nous voterons contre. »

RESULTAT?

Délibération adoptée, 4 votes « contre », (élu-e-s d’Ensemble pour Bures) , une abstention (élue de la majorité).